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Ville d'art et de traditions .
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Pézenas, au carrefour des plages de la
Méditérranée, et de
l'arrière pays de l'Hérault, entre
Béziers et Montpellier, est l'une des villes
de charme qui séduisent à coup
sûr le visiteur.
Son cur bat au rythme des métiers
d'arts qu'une trentaine d'artisans et d'artisans
d'art font vivre toute l'année. Sa Maison
des Métiers d'Arts est un outil pour faire
connaître les métiers du bois, de la
pierre, du fer, et les métiers de la
scène (Molière oblige!} sous forme
d'expositions et de formations. En
été, les échoppes permettent
une animation appréciée, dans les
rues ombragées, et vous pouvez venir aux
nocturnes des artisans tous les mercredis et
vendredis soirs pour flaner ou dénicher
I'objet rare auprès de nos brocanteurs
Pézénas est une ville de traditions,
comme au Moyen-Age, on y voit se promener depuis
1226 un animal étrange, le Poulain, qui
rassemble petits et grands lors des moments forts
de la vie piscénoise. On peut y goûter
depuis le XVII ou XVIII ême siècle "
Les Berlingots de Pézenas " et depuis le
passage de Lord Clive en 1768, le " Petit
Pâté ", bobine
sucré-salé, que l'on peut servir en
apéritif ou en dessert et dont le secret de
fabrication se transmet de génération
en génération. Le vin se
découvre, se goûte, s'apprivoise dans
les caves particulières ou
coopératives du Pays de
Pézénas.
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Pour en savoir plus
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Brève
Histoire ou Pézénas en trois
actes,
de Claude ALBERGE ( Office
du Tourisme de Pézénas )
Acte premier :
Le premier indique, au cur du beau XlIIe
siècle, une ville marchande, associée
à sa voisine Montagnac dans un cycle annuel de
cinq foires, que l'on a souvent comparé, pour le
Midi à celui des foires de Champagne, pour le
Nord.
À la croisée des chemins est-ouest, du
Rhône aux Pyrénées et à la
Garonne (l'ancien chemin d'Héraclès, la
voie Domitienne, le chemin de la reine Juliette) et
sud-nord, de la mer à la montagne riche en
métaux, au cur de la vallée de
l'Hérault, la position géographique est
certes intéressante. Dès le premier
âge du fer, elle a d'ailleurs fixé, sur une
butte à un kilomètre en amont du site
actuel, un îlot de peuplement, qui commerce avec le
monde méditerranéen, comme l'atteste le
mobilier, en particulier étrusque, exhumé
de la nécropole de Saint-Julien, (fin Vlle
début Vle siècle avant J.-C.)
Établie dans la plaine de I'Hérault la
colonie de droit latin, dont Pline vante la
qualité des laines s'efface bien vite au vent des
invasions et sous les limons du fleuve. Lorsqu'il
réapparaît vers la fin du Xe siècle,
le site, qui s'est à nouveau
déplacé, n'est plus occupé que par
un pauvre "castrum" sur une "motte" défendant le
passage de l'Hérault et I'accès à la
Montagne Noire orientale par la vallée de La
Peyne.
C'est aux Capétiens que Pézenas doit, avec
son rattachement au domaine royal, une première
fortune. Dix ans après son achat par Saint-Louis
en 1262, le souverain lui accorde sa première
foire marchande. D'autres suivront, qui feront sa
renommée jusqu'au début du XlXe
siècle.
Pour la fête de la Nativité de la Vierge en
septembre, la Saint-Amans, début novembre, le
lundi de Pentecôte, places et rues dont la rue de
la Foire, appelée autrefois rue droite, qui longe
le rempart sud-ouest, sont encombrées par les "
alas " et " tabularia " des marchands et changeurs
Montpelliérains, mais aussi Provençaux,
Dauphinois, Savoyards, Piémontais et Florentins
viennent chercher épices, merceries, monnaies et
lettres de change, mais surtout ces pièces de "
petits draps " fabriquées par les paysans des
avants-monts du Massif Central et des
Pyrénées. Les marchands sont
protégés dans leurs voyages et leurs
transactions. En échange, le roi tire de
substantiels profits des péages et autres "
tasques ", la ville des loyers de l'afflux de
populations. Jacques Cur, Grand Argentier du roi
Charles Vll ne s'y tompe pas. Au lendemain de la Guerre
de cent Ans, il afferme plusieurs années durant
les foires de Pézenas-Montagnac pour 9000 à
12000 livres.
Aux XVlle et XVllle siècles, bien qu'ayant
beaucoup perdu de leur rayonnement, elles restent un bon
" baromètre de l'économie languedocienne ".
Les prix des matières premières textiles y
sont établis, comme celui des eaux-de-vie, chaque
samedi, marché des " Trois Six ", par les
distillateurs de la ville, de ses environs, et les
négociants du port de Cette.
De cette activité d'échanges, qui fut
à l'origine du développement de la ville,
subsiste encore aujourd'hui le traditionnel marché
hebdomadaire, transféré du jeudi au samedi
par lettres patentes du roi Charles VII du 28 novembre
1484, et une zone d'influence commerciale qui
s'étend sur une trentaine de villages
alentours.
Acte deuxième :
Du milieu du XVle au premier tiers du siècle
suivant, Pézenas construit peu peu son image de
centre politique, jusqu'à devenir la capitale
gobernorale de la province de Languedoc et la ville des
États, avant être brutalement
dépouillée de cette nouvelle fonction.
Malgré les misères des guerres religieuses,
accompagnées de leur cortège de pestes, qui
perdurent jusqu'au siège de Montpellier de 1622,
et en raison même des conflits qui déchirent
la province comme le royaume, s'affirme le rôle des
chefs militaires que sont les gouverneurs de province
choisis par le roi. Ici, en Languedoc, ils tiennent
pendant plus d'un siècle à une même
famille, celle des Montmorency, originaires
d'île-de-France. En grands seigneurs, Anne, suivi
de Henri 1er , puis Henri II, établis aux portes
de la ville, dans leur domaine de la Grange des
Prés, s'appuient sur une aristocratie et une
bourgeoisie issues du beau XVle siècle. Ils
tissent peu à peu des liens de vassalité,
de clientèle, qui les placent au rang de
souverains dans leur province. Et ce, au moment
même où le pouvoir royal, contraint à
faire vivre la guerre, renforce son emprise par un tour
de vis fiscal sans précédent. Richelieu
annonce Mazarin et la révolte de 1632 sera un
prélude à la Fronde.
À la charnière des deux siècles, la
ville atteint son apogée, alors qu'Henri de
Navarre, devenu roi de France, la dote d'un
collège, que les consuls veillent à la
construction d'une nouvelle enceinte et que le chapitre
de la Collégiale Saint-Jean fait accompagner les "
Te deum " par les six jeux d'un nouvel orgue à
volets peints.
Cette ville se veut d'agrément, dotée de la
fameuse promenade du Quai, bordée de ces
hôtels aristocratiques, qui font encore son charme.
Elle accueille, il est vrai, plus fréquemment que
d'autres, pourtant plus grosses en population, les
États provinciaux, cette assemblée des
trois ordres (Clergé, Noblesse et Tiers
État), itinérante et
délibérante, qui consent l'impôt au
roi sous forme d'un " don " et contrôle le
maniement des deniers de la province. Parce qu'à
l'abri des querelles de type féodal qui opposent
parfois les seigneurs évêques à leurs
sujets - le siège épiscopal est à
Agde - loin de l'agitation des Parlementaires de Toulouse
ou des officiers de la Cour des Comptes, Aides et
Finances de Montpellier, loin des querelles religieuses -
la Réforme s'est arrêtée à
l'Hérault - c'est à Pézenas qu'ils
se retrouvent le plus fréquemment. Ainsi la ville
augmente-t-elle ses richesses. Jusqu'au jour où ce
patient travail de construction s'effondre, tel un
château de cartes, dans un affrontement sanglant
entre un prince-gouverneur qui se croyait roi, une ville
qui se regardait comme une capitale et Paris qui, par ses
cohortes d'officiers, fermiers traitants et autres
percepteurs, construisait sûrement la monarchie
absolue.
Le 22 juillet 1632, au cours d'une séance des
États réunis à Pézenas Henri
II de Montmorency, appuyé par Marie de
Médicis, la reine mère, Gaston
d'Orléans, frère du roi, et I'Espagne,
prend la tête d'une rébellion dirigée
contre l'une des dernières décisions du
cardinal de Richelieu, " l'Édit des Élus "
qui supprimait d'un trait de plume les privilèges
fiscaux de la province. Mais l'aventure tourne court. Le
prince, qui se conduit comme chevalier en tournoi, est
défait à la bataille de Castelnaudary,
décapité à Toulouse. Son
château de Pézenas est rasé. Les
temps féodaux s'achèvent, la gloire
politique de Pézénas aussi.
Acte troisième :
Vingt ans après, sans en avoir conscience, sa
destinée l'entraînait pourtant vers une
nouvelle rencontre, celle d'un prince qui se nommait
Armand de Bourbon de Conti et d'un comédien, qui
depuis peu se faisait appeler Molière.
En pleine Fronde des princes, après son
échec à Bordeaux, le premier est venu
trouver retraite dans le domaine familial de la Grange
des Prés, hérité des Montmorency,
par sa mère Charlotte, mariée à
Henri de Bourbon Condé, " la plus belle maison du
Languedoc ". La galante compagnie qui l'entoure est
à la recherche de jeux et divertissements.
L'abbé Daniel de Cosnac, premier gentilhomme de la
chambre, raconte dans ses " Mémoires " comment,
sur les recommandations de Sarrasin, un libertin s'il en
fut, la troupe nomade de Monseigneur le duc
d'Épernon, où se trouvait Jean-Baptiste
Poquelin, fut heureusement préférée
à celle d'un certain Cormier.
Depuis qu'ils avaient abandonné Paris après
l'échec de " L'illustre Théâtre",
à l'automne 1645, les Béjart et leurs amis
couraient villes et campagnes. Après l'Ouest,
Nantes, Poitiers et Bordeaux, c'est la province de
Languedoc qui allait devenir pendant dix ans, de 1647
à 1657, leur séjour de prédilection.
Ils y retrouvèrent en effet leurs compagnons de
plaisir du quartier du Marais, les d'Aubijoux, gouverneur
de la place de Montpellier, Sarrasin et Guilleragues qui
formaient alors la petite cour de Conti.
Rentré bientôt en grâce auprès
du jeune Louis XIV, marié à une
nièce de Mazarin, Anne-Marie Martinozzi, le jeune
Armand, pourtant destiné à une
carrière d'Église, gagne bientôt,
avec le commandement en chef de l'armée de
Catalogne, le titre et les gratifications de gouverneur
de Guyenne puis de Languedoc. Et Pézenas retrouve
ses fastes d'antan, avec le séjour du prince, le
retour des États que Molière et ses amis
régalent de farces et de tragi-comédies.
Selon la tradition, " le Médecin volant " aurait
été donné à l'automne 1655
dans les chambres et jardins de l'hôtel d'Alfonce
à Pézenas, devenu ainsi un des hauts lieux
du culte rendu à notre gloire nationale. Ce qui
est sûr c'est que l'année suivante vit la
création à Béziers, du "
Dépit amoureux " et le dernier séjour de la
troupe à Pézenas. Inquiet de l'avenir de
son âme, Conti s'enfonce alors dans la bigoterie.
Enlevant sa protection et ses deniers à nos
comédiens, il leur interdit de porter son nom. On
connaît la suite: le 21 octobre 1658, dans la salle
des gardes du Vieux Louvre, ils donnent "
l'Androméde " de Corneille et " le Docteur
amoureux " devant le jeune roi conquis.
En raison de ses fréquents séjours, le
mouvement moliériste du XlXe siècle a fait
de Pézenas l'étape obligée de tous
ceux qui aiment Molière, à travers son
théâtre et les légendes qui
s'attachent à son séjour. L'une de ses
comédies: " Monsieur de Pourceaugnac " met en
scène une jeune paysanne du nom de " Lucette " qui
déclare, en langue occitane, être
mariée à Pézenas. La plus
célèbre des légendes raconte comment
Molière aimait s'asseoir dans un fauteuil de bois,
chez son ami le barbier Gély, place du
Marché au Bled. Quelques histoires y ont pris
corps dans les paysages familiers de la vallée de
l'Hérault, de Marseillan à Montagnac, de la
fontaine de Gignac au château de Lavagnac.
Après la mort du prince en 1666 et une
dernière réunion des États en
1692,la ville devait conserver au XVlIIe siècle
les fonctions d'une petite métropole de 8000
âmes, au cur d'un pays bien typé,
celui de Pézenas. Grâce à la route,
les échanges y augmentaient les fortunes
terriennes et commerciales, poussaient au
développement de petites industries de type
artisanal: distilleries, filatures de soie, savonneries,
tanneries, fabriques de verdet et de soude artificielle.
Les naissances se multiplient. Dans un cadre
aménagé, le cours capricieux de la Peyne
est enfin domestiqué. La collégiale
Saint-Jean est entièrement reconstruite et la
maison consulaire reçoit une nouvelle
façade de majesté. C'est une cité
florissante qui entre ainsi dans la Révolution. La
prospérité va se poursuivre encore, avec
quelques aléas dans la première
moitié du XlXe siècle, avant que la
monoculture de la vigne et l'éloignement de la
voie ferrée n'arrêtent ce nouveau
départ.
Le long sommeil qui suivit fait qu'aujourd'hui
Pézenas a pu conserver ce cadre architectural
exceptionnel. C'est une ville où il fait bon
vivre. Tous les Piscénois - c'est Ie nom que
portent ses habitants - vous Ie diront.
Claude ALBERGE

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